Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol16.djvu/260

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


XXXII

Lévine avait remarqué depuis longtemps que les gens doués d’une politesse obséquieuse et d’une soumission excessive ne tardent pas à se rendre insupportables par leurs exigences et leurs caprices. Il pressentait qu’il en serait de même avec son frère. Et, en effet, la douceur de Nicolas fut de courte durée. Dès le lendemain matin, il devint grincheux et taquina systématiquement Lévine en l’attaquant sur tous ses points les plus sensibles.

Lévine se sentait coupable, mais que pouvait-il faire à cela ? Il sentait que s’il leur avait été possible de s’expliquer franchement et sans feinte, s’il leur avait été donné de se communiquer librement leurs sentiments et leurs pensées, ils n’auraient redouté ni l’un ni l’autre de se regarder droit dans les yeux, et leur conversation eût été celle-ci : « Tu vas mourir ! Tu vas mourir ! » aurait dit