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meilleur au point de vue du bien-être général. Une fois attelé à cette tâche, il relut encore soigneusement tout ce qui se rapportait à ce sujet, et il décida de partir en automne pour l’étranger afin d’étudier cette question sur place ; il voulait à tout prix éviter de retomber dans l’hésitation où il s’était si souvent débattu au sujet de diverses autres questions.

Aussitôt en effet qu’il commençait à comprendre la pensée de son interlocuteur et à vouloir exposer la sienne propre, on lui objectait : « N’avez-vous donc pas lu les écrits de Kaufmann, de John, de Dubois, de Micheli ? Lisez-les, ils ont très sérieusement étudié cette question. » Il était convaincu désormais que Kaufmann ni Micheli n’avaient rien à lui apprendre. Il savait ce qu’il voulait savoir. Il avait été à même de remarquer que la Russie possède un sol excellent et de bons travailleurs, et qu’en certains cas, comme chez le paysan dans la maison duquel il s’était arrêté en allant chez Sviajskï, ces travailleurs et cette terre produisent beaucoup, tandis que, le plus souvent, avec l’emploi des procédés européens, le rendement est des plus médiocres ; ces faits, pour lui, s’expliquaient d’eux-mêmes : les ouvriers, il le savait, entendent travailler à leur manière, et leur opposition aux nouveaux procédés n’est pas un fait de hasard, mais le résultat d’habitudes profondément enracinées dans l’esprit du peuple. Le peuple russe,