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nouveaux liens. Quant au divorce légal, celui qui entraînerait le châtiment de la femme coupable, Alexis Alexandrovitch ne voyait pas la possibilité d’y recourir. Il comprenait que les conditions complexes de sa vie ne lui permettaient pas d’avoir recours aux preuves grossières qu’exigeait la loi pour démontrer la culpabilité de la femme. Il sentait que le raffinement des mœurs de la société à laquelle il appartenait, lui interdisait l’usage de ces preuves, quelque flagrantes qu’elles fussent, et qu’en les fournissant il s’abaisserait lui-même dans l’opinion publique à un niveau inférieur à celui de sa femme.

Une tentative de divorce ne pouvait d’ailleurs donner lieu qu’à un procès scandaleux, véritable aubaine pour ses ennemis, qui en profiteraient pour le calomnier et tâcher d’ébranler sa haute situation sociale ; de sorte que le but vers lequel il tendait et qui consistait à sortir de cette situation critique avec le minimum de dommage possible ne serait pas non plus atteint avec cette solution. En outre, le divorce, ou toute tentative dans ce sens, avait pour résultat d’éloigner à jamais la femme de son mari, en favorisant au contraire le rapprochement de celle-ci avec son amant ; or, malgré l’indifférence complète et en dépit du mépris qu’il professait à l’égard de sa femme, il redoutait au fond de son âme tout ce qui pouvait faciliter son union avec Vronskï, ne voulant à aucun