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le plus vite possible, continua Oblonskï en lui remplissant son verre.

— Non, merci, je ne puis plus boire, dit Lévine en repoussant son verre, je serais ivre. Eh bien, comment cela va-t-il chez toi ? continua-t-il, désirant visiblement changer le sujet de la conversation.

— Encore un mot. En tous les cas, je te conseille de trancher la question au plus vite. Aujourd’hui je ne t’engage pas à parler, dit Stépan Arkadiévitch. Viens demain matin, fais classiquement ta demande et que Dieu te vienne en aide…

— Eh bien, si tu as toujours l’intention de venir chez moi pour la chasse, viens au printemps, dit Lévine.

Maintenant il regrettait de toute son âme d’avoir entamé cette conversation avec Stépan Arkadiévitch ; ses sentiments intimes étaient outragés par ce qu’il venait d’apprendre sur la rivalité d’un officier quelconque de Pétersbourg, par les suppositions et les conseils de son ami.

Stépan Arkadiévitch sourit. Il comprenait ce qui se passait dans l’âme de Lévine.

— Je viendrai un jour, répondit-il. Oui, mon cher, la femme est le pivot sur lequel tourne toute l’existence. Vois-tu, mes affaires aussi sont très mauvaises… très mauvaises… Et toujours à cause des femmes. Parle-moi franchement — continua-t-il en prenant un cigare et posant la main sur son verre — donne-moi un conseil.