Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol15.djvu/94

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

quelques instants auparavant et qui, tout à coup, s’était transformée en une expression dure et désagréable.

— Vronskï est le fils du comte Cyrille Ivanovitch Vronskï, et l’un des meilleurs spécimens de la jeunesse dorée de Pétersbourg ; j’ai fait sa connaissance à Tver, quand j’ai servi là-bas ; il y était venu pour l’enrôlement. Il est riche et beau, il a de grandes relations, est aide de camp de l’empereur et joint à ces avantages celui d’être un bon et charmant garçon. Mais il est plus qu’un bon garçon tout court, j’ai pu m’apercevoir ici qu’il est instruit et intelligent. Il ira loin.

Lévine fronça les sourcils et se tut.

— Eh bien, il est arrivé ici peu après ton départ, et, à ce qu’il me semble, il est follement amoureux de Kitty, et tu comprends que la mère…

— Excuse-moi, mais je ne comprends rien, dit Lévine en fronçant davantage les sourcils, et aussitôt il se rappela son frère Nicolas et se reprocha de l’avoir oublié.

— Attends, attends ! dit Stépan Arkadiévitch en souriant et lui prenant la main ; je te dis ce que je sais mais je te répète que dans cette affaire délicate, autant qu’on en peut juger, les chances sont de ton côté.

Lévine se renversa sur sa chaise, son visage était très pâle.

— Mais je te conseillerais de trancher la question