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Kitty ne patinait pas avec une parfaite sûreté, les mains hors du petit manchon retenu à son cou par un ruban, elle se tenait prête à saisir un appui. Elle regardait Lévine qu’elle avait reconnu, et voyant sa crainte lui souriait. Ayant pris son élan, elle donna un petit coup de talon, glissa jusqu’à son cousin et s’appuya sur lui des deux mains ; en souriant elle salua Lévine de la tête. Jamais son imagination ne la lui avait présentée plus belle.

Quand il pensait à elle, il se la représentait très nettement ; il goûtait surtout le charme de cette petite tête blonde, avec son expression de sérénité naïve et de bonté, si gracieusement posée sur ses jolies épaules de jeune fille. L’expression enfantine de son visage jointe à l’élégante beauté de son corps lui donnait un attrait particulier qu’il connaissait bien. Mais ce qui toujours surprenait Lévine et le frappait en elle, c’était l’expression douce, calme et sincère de ses yeux et surtout son sourire qui toujours le transportait dans un monde enchanté et lui procurait une douce émotion qui lui rappelait les quelques rares jours de bonheur de sa tendre enfance.

— Êtes-vous arrivé depuis longtemps ? dit-elle en lui tendant la main. Merci, ajouta-t-elle quand il eut ramassé le mouchoir qui était tombé de son manchon.

— Moi ? Récemment… c’est hier… c’est-à-dire aujourd’hui… que je suis arrivé… répondit Lévine