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efforts, de son cou fin, tout en sueur ; il se débattait sur le sol, près de ses jambes, comme un oiseau blessé : le mouvement maladroit fait par Vronskï lui avait brisé les reins ; mais il ne le comprit que beaucoup plus tard ; maintenant il ne voyait qu’une chose : que Makhotine s’éloignait rapidement et que lui, Vronskï, était seul, immobile sur le sol boueux, et que devant lui gisait Froufrou respirant lourdement, la tête penchée, et le regardant d’un œil suppliant. Il ne comprenait pas encore ce qui était arrivé. Vronskï tira sa jument par la bride ; de nouveau elle se débattit, comme un petit poisson, en faisant craquer les ailes de la selle ; elle dégagea ses pattes de devant, mais n’eut pas la force de soulever sa croupe, se débattit encore et de nouveau retomba sur le flanc.

Vronskï, le visage défiguré par la colère, pâle, les lèvres tremblantes, lui donna un coup de talon dans le ventre et se remit à tirer les guides. Mais l’animal ne bougea pas, et, poussant seulement sa tête vers son maître, le regarda semblant vouloir parler.

— Ah ! ah ! ah ! hurla Vronskï en se prenant la tête. Ah ! qu’ai-je fait ! s’écria-t-il. La course perdue, et par une faute honteuse, impardonnable ! Et cette malheureuse bête, si bonne, perdue ! Ah ! qu’ai-je fait !

Des gens, des médecins, des infirmiers, des officiers de son régiment accouraient vers lui. À son