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XIX

Le jour des courses à Krasnoié-Sélo, Vronskï vint plus tôt que d’habitude manger son bifteck dans la salle à manger commune des officiers de son régiment. Il n’avait pas besoin d’un entraînement sévère, il avait juste le poids fixé, quatre pouds et demi, mais il lui importait de ne pas grossir, c’est pourquoi il évitait les farineux et le sucre. En veston déboutonné et gilet blanc, il était assis, les deux bras accoudés sur la table, attendant son bifteck, et il regardait un roman français posé sur son assiette. Il regardait le livre uniquement pour ne pas parler aux officiers qui entraient et sortaient. Il pensait.

Il pensait au rendez-vous qu’Anna avait promis de lui donner après les courses ; il ne l’avait pas vue depuis trois jours et, en raison du retour de son mari de l’étranger, il ne savait pas si oui ou non le rendez-vous serait possible aujourd’hui, mais il n’avait aucun moyen de se renseigner.