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expériences, de manquer de sens philosophique. Et tout à coup lui vint une pensée joyeuse : « Dans deux ans, j’aurai deux vaches hollandaises dans mon troupeau. Pava sera sans doute encore vivante, douze filles de Berkout seront peut-être mêlées au troupeau. Ce sera superbe ! »

Il reprit son livre : « Bon ! L’électricité et la chaleur ne font qu’un, mais pour résoudre une question, peut-on, dans l’équation, remplacer l’une par l’autre ? Non. Et bien alors ? Il n’est besoin que de l’instinct pour saisir le lien qui existe entre toutes les forces de la nature… Ce sera surtout agréable quand la fille de Pava sera devenue une belle vache rousse et que le troupeau se sera augmenté de ces trois bêtes ! Ce sera superbe ! J’irai avec ma femme et les invités au-devant du troupeau… Ma femme dira : Kostia et moi nous avons soigné cette petite génisse comme un enfant. — Comment cela peut-il vous intéresser autant ? demandera quelqu’un. — Tout ce qui l’intéresse m’intéresse aussi… Mais qui sera-t-elle ? »

Ensuite, il se rappela tout ce qui s’était passé à Moscou. « Eh bien, que faire ? pensait il. Je n’y peux rien. Mais maintenant tout ira autrement. C’est stupide d’être enchaîné par le passé ! Il faut lutter pour vivre mieux, beaucoup mieux… »

Il leva la tête et réfléchit. La vieille Laska, encore tout heureuse de son retour et qui venait de courir dans la cour en jappant, rentra en agitant la queue