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— Allah !

Tous répétèrent :

— Allah !

Et le silence se fit de nouveau.

Le mort, étendu rigide, sous la toile qui le couvrait, n’était pas plus immobile que les assistants. On n’entendait que le bruissement des petites feuilles du platane qu’agitait le vent. Le mollah fit une prière. Tous se levèrent. On prit le mort et on le porta à bras vers une fosse. Cette fosse n’était point creusée verticalement, comme de coutume, mais horizontalement, en forme de caveau.

On prit le mort sous les aisselles, on le plia en deux, on l’introduisit dans le caveau et on lui croisa les bras sur la poitrine.

Un Nogaï apporta des roseaux fraîchement coupés dont on recouvrit l’ouverture de la fosse. On mit par-dessus de la terre qu’on égalisa. Et on plaça une grosse pierre à l’endroit où reposait la tête du mort.

Tous se groupèrent de nouveau devant la tombe et demeurèrent silencieux.

— Allah ! Allah ! Allah ! dirent-ils, après un long silence. Puis tous soupirèrent et se levèrent.

Le Tatar roux distribua de l’argent aux vieillards. Il se leva, prit une cravache, trois fois s’en frappa le front, et revint à la maison.

Le lendemain matin, le Tatar roux prit une jument et, suivi de trois Tatars, alla derrière le village.