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— Toi, dis à ce chien que s’il veut me faire peur, il n’aura pas un seul kopek, car je n’écrirai pas… Je ne vous crains pas, chiens que vous êtes, et je ne vous craindrai jamais.

L’interprète transmit ces paroles aux Tatars, qui se remirent à parler tous à la fois. Après avoir longtemps baragouiné, le brun se leva de nouveau et s’approcha de Jiline.

— Uruss, dit-il, djiguit, djiguit, Uruss.

En tatar djiguit signifie brave.

Toujours riant, Abdul dit quelques mots à l’interprète qui traduisit :

— Donne mille roubles.

Jiline tint bon :

— Je donnerai cinq cents roubles et rien de plus… Si vous me tuez, vous n’aurez rien.

Les Tatars se remirent à causer ; ils donnèrent un ordre au serviteur qui sortit.

Ils continuaient de parler, regardant tantôt la porte, tantôt Jiline.

Le serviteur revint, accompagné d’un gros homme. Cet homme était pieds nus et avait les jambes entravées comme celles de Jiline. Jiline ne put retenir un cri. Il avait reconnu Kostiline. Lui aussi avait été capturé.

On plaça Kostiline à côté de son camarade. Ils se racontèrent leurs aventures. Les Tatars les regardaient silencieux. Jiline raconta ce qui lui était arrivé. Kostiline raconta que son cheval s’était