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chez la tortue les côtes sont en-dessus, recouvrant la chair.


Boulka et le Loup.

La guerre n’était pas terminée quand je quittai le Caucase, et il y avait danger à voyager, la nuit, sans escorte.

Voulant partir à la première heure du matin, je résolus de ne pas me coucher.

Un ami vint me tenir compagnie ; nous passâmes ensemble la soirée et la nuit, assis devant ma cabane, dans la rue du bourg cosaque.

La lune était voilée de brume, malgré cela il faisait si clair qu’on aurait pu lire.

Soudain, au milieu de la nuit, nous entendîmes de l’autre côté de la rue, dans une cour, piauler un cochon de lait. L’un de nous cria :

— C’est un loup qui étrangle un cochon de lait !

Je courus dans la cabane, saisis mon fusil chargé et m’élançai dans la rue. Des gens s’étaient massés à la porte cochère de la maison où piaulait le cochon de lait. Tous me crièrent :

— Par ici ! Par ici !…

Milton me suivit, en bondissant, croyant sans doute que je partais pour la chasse, avec mon fusil. Tant qu’à Boulka, il dressait ses courtes oreilles et allait de côté et d’autre, semblant attendre l’ordre d’enfoncer ses crocs. Comme j’accourais vers la