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Il se mit à frapper le cheval des pieds et de la cravache, et Voronok passa au galop devant nous.

Après l’aîné, ce fut l’autre frère. Lui aussi chevaucha longtemps ; lui aussi, à coups de cravache, mit au galop Voronok, et descendit le coteau à fond de train. Il voulait continuer, mais le troisième frère le supplia de descendre plus vite. Celui-ci, comme les autres, alla jusqu’à la grange, fit le tour du jardin, traversa le village et, au galop, descendit du coteau vers l’écurie. Lorsqu’il fut près de nous, Voronok souffla bruyamment ; son cou et ses épaules étaient noirs de sueur.

Quand ce fut mon tour, je voulus étonner mes frères et leur montrer mon habileté à cheval. Je voulus lancer Voronok de toutes mes forces, mais il ne voulait point s’éloigner de l’écurie, et j’avais beau le frapper, il se refusait à courir : il avait peur et se retournait à tout moment.

Je m’emportai contre le cheval et le frappai à grands coups de cravache et de talons, j’essayai de l’atteindre aux endroits les plus sensibles, je cassai ma cravache et me mis à lui frapper la tête avec le manche brisé. Mais Voronok ne voulait toujours pas galoper.

Alors, je me tournai vers le sous-maître et le priai de me donner une cravache un peu plus forte. Mais il me répondit :

— C’est assez chevauché, monsieur, descendez. Pourquoi martyriser ce cheval ?