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à toute l’Europe. De même, dans toute l’Europe, existe cette opinion de la classe instruisante que l’école primaire est le premier degré de l’instruction. L’origine de cette opinion, qui paraît déraisonnable, devient très claire dès que nous examinons la marche historique de l’instruction. Les premières écoles fondées ne furent pas des écoles primaires mais des écoles supérieures ; il y eut d’abord celles des couvents, puis ce furent les écoles secondaires, ensuite les écoles primaires. Chez nous, l’Académie fut fondée avant tout ; ensuite vinrent les universités, puis les lycées, enfin les écoles primaires et les écoles populaires. De ce point de vue historique le manuel de Smaragdov, qui, en trente-deux pages, raconte l’histoire de l’humanité, est aussi nécessaire à l’école primaire urbaine que la lecture et l’écriture sont nécessaires à l’école populaire. La lecture et l’écriture forment le dernier degré d’instruction dans cette hiérarchie organisée des institutions, ou le premier degré de l’autre extrémité, c’est pourquoi l’école inférieure ne doit répondre qu’aux besoins imposés par l’école supérieure.

Mais il y a un autre point de vue, duquel l’école populaire se présente comme une institution indépendante n’étant pas obligée de subir les défauts de l’instruction supérieure mais ayant son but indépendant : l’instruction du peuple. Plus on descend sur cette échelle de l’instruction établie par l’État, plus on sent la nécessité de faire, à chaque degré,