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longtemps les écoles européennes, cercle vicieux en effet, puisque l’école devait faire avancer l’instruction intuitive et l’instruction intuitive faire avancer l’école. Les peuples européens ont vaincu cette difficulté, mais la lutte n’a pas été sans dommages. Soyons donc reconnaissants pour le travail dont nous sommes appelés à jouir et, par conséquent, n’oublions pas qu’il nous faut travailler sur un terrain différent. En nous basant sur l’expérience de l’humanité et sur ce fait que notre activité est vierge encore, nous pouvons apporter à notre besogne une plus grande conscience, et nous devons le faire.

Pour emprunter les procédés des écoles européennes, nous sommes obligés de distinguer ce qui est fondé sur les lois éternelles de la raison et ce qui est dû seulement aux conditions historiques. Il n’y a pas de loi générale raisonnable, pas de critérium qui justifie l’emploi de la force pour l’instruction du peuple.

C’est pourquoi chaque imitation de l’école européenne, en tant qu’école obligatoire, sera pour notre peuple, non un pas en avant, mais un recul.

On comprend pourquoi s’est formée en France une école bien disciplinée avec l’enseignement des sciences exactes — mathématiques, géographie, dessin ; pourquoi en Allemagne s’est formée une école gourmée avec prépondérance du chant et de l’analyse. On comprend pourquoi, en Angle-