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La dernière raison et, selon moi, la plus importante, est celle-ci : il convient aux Allemands, qui ont l’école depuis deux siècles, de la défendre au point de vue historique, mais nous, par quelles raisons pouvons-nous défendre l’école populaire qui n’existe pas chez nous ? Quel droit historique avons-nous de dire que nos écoles doivent être semblables aux écoles européennes ? Nous n’avons pas encore une histoire de l’instruction publique. Et, en étudiant attentivement l’histoire générale de l’instruction publique, non seulement nous nous convainquons qu’il nous est impossible de construire à la façon allemande les séminaires pour les professeurs, de refaire la méthode phonétique allemande, les infantschools anglaises, les lycées français et les écoles spéciales, et par ces moyens, de rattraper l’Europe, mais nous nous convainquons que nous, Russes, nous vivons dans des conditions exceptionnellement heureuses au point de vue de l’instruction populaire, que notre école ne doit pas, comme celle de l’Europe du moyen âge, sortir des conditions sociales, qu’elle ne doit pas servir à certain but gouvernemental ou religieux, qu’elle ne doit pas s’élaborer dans les ténèbres en l’absence du contrôle de l’opinion publique, ni en l’absence de l’instruction par la vie développée au plus haut degré, qu’elle ne doit pas au prix de nouveaux et douloureux efforts se débattre dans ce cercle vicieux où se trouvèrent si