répondre d’eux comme de moi-même. Je compris
que la seule idée du soupçon les avait affectés profondément,
péniblement. Un garçon, que j’appellerai
Féodor, une nature riche et tendre, tout pâle,
tremblait et pleurait. Ils promirent de dénoncer le
coupable s’ils le dévoilaient, mais ils refusèrent de
le chercher. Quelques jours plus tard, le voleur
était découvert. C’était un garçon d’un village éloigné.
Il avait entraîné avec lui un jeune paysan du
même village, et tous les deux avaient caché les
objets volés dans leurs coffres. Cette découverte
produisit une étrange impression sur les camarades :
le soulagement, la joie s’unissaient au mépris,
à la pitié pour les voleurs. Nous leur laissâmes
le soin de la punition. Les uns demandèrent
à fouetter les voleurs, mais tenaient absolument à
les fouetter eux-mêmes ; d’autres proposèrent un
écriteau avec le mot « voleur ». Cette punition, à
notre honte, avait été employée par nous, et ce
même garçon qui, une année auparavant, avait
porté l’écriteau avec le mot « menteur » était le premier
à exiger l’écriteau pour le voleur.
Nous tombâmes d’accord pour l’écriteau ; et quand une des fillettes eut cousu l’écriteau, tous les élèves, avec une joie méchante, regardèrent les coupables et se moquèrent d’eux. Ils exigeaient même une aggravation de peine : les conduire par tout le village et leur laisser l’écriteau jusqu’à la fête. Les garçons punis pleuraient. L’enfant en-