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mêmes besoins que nous et pensent de la même façon. Tous veulent apprendre, c’est pourquoi ils viennent à l’école, et c’est pourquoi il leur sera facile d’arriver à la conclusion qu’il faut se soumettre à certaines conditions pour apprendre. C’est peu qu’ils soient des hommes, ils sont aussi une société d’hommes unis par la même pensée : « Et là où deux, trois se réunissent en mon nom, je suis parmi eux. » Ils se soumettent sans révolte aux lois qui découlent de la nature, mais ils se révoltent en se soumettant à votre immixtion prématurée, n’ayant pas foi au commandement de votre sonnette, à vos emplois du temps, à vos règlements. Que de fois m’est-il arrivé de voir des enfants se battre : le maître s’élance pour les séparer, et les ennemis séparés se regardent de côté, et même, en présence du maître, ne se retiennent pas de se donner une dernière poussée, plus forte que les autres.

Je vois chaque jour un Kiruchka quelconque qui, les dents serrées, se jette sur Tarass, l’attrape aux cheveux, le renverse à terre et semble ne pas vouloir s’arrêter avant d’avoir estropié son adversaire. Une minute après, Tarass rit déjà, et cinq minutes ne se passent pas que, de nouveau, ils seront amis et s’installeront l’un à côté de l’autre. Récemment, entre deux leçons, dans la cour, deux garçons se sont entrepris. L’un, âgé de neuf ans, de la deuxième classe, très fort en arithmétique ; l’autre, aux cheveux coupés, intelligent, vindicatif, petit,