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pleurs de sa mère, à moitié endormi, dans un endroit quelconque, sur les planches, et qui, les yeux brillants, effrayés, suit ce qui se passe dans l’isba. Vous voyez cette douloureuse femme de soldat qui la veille de ce jour, disait : « Est-ce qu’il ne crèvera pas bientôt ! » et qui se repent, et qui est si accablée à la pensée de cette mort qu’elle ne peut dire que ces mots : « Mon fils est mort ! » Elle ne sait plus ce qu’il faut faire et appelle la vieille à son aide. Vous voyez cette vieille harassée du fardeau de la vie, voûtée, maigre, les membres osseux, qui, la main habituée au travail, sans se hâter, tranquillement se met à l’œuvre, allume le copeau, apporte l’eau, lave l’enfant, met tout en place et, le cadavre lavé et ceinturé, le dépose sous les icônes. Vous voyez ces icônes, toute cette nuit sans sommeil jusqu’à l’aube, comme si vous-même l’aviez vécue, comme la voit l’enfant qui regarde de dessous le cafetan. Cette nuit vous apparaît avec tous ses détails et se grave dans votre imagination.

Dans le troisième chapitre, mon influence est déjà moindre. Tout le personnage de la servante lui appartient. Dès le premier chapitre, d’un seul trait il a caractérisé les rapports de la fille aînée envers la famille. « Elle travaillait pour elle, pour avoir des robes et se préparait à se marier. » Ce seul trait nous montre déjà la fille qui ne peut prendre part et, en effet, ne prend pas part aux joies et aux peines de la famille. Elle a son intérêt très légitime,