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peut-être de voir… À mon âge… Je suis toujours malade… Je puis mourir d’un moment à l’autre. »

Dans le second chapitre, on remarque encore davantage mon influence dans la banalité, mais, de nouveau, les traits caractéristiques dans la description des tableaux et la mort de l’enfant rachètent tout. J’ai soufflé que l’enfant avait des jambes très minces, les détails sentimentaux sur l’oncle Néfède qui fait le petit cercueil ; mais les plaintes de la mère exprimées par ces seuls mots : « Dieu, ne crèvera-t-il pas ! » donnent au lecteur tout le sens de la situation. Et ensuite, cette nuit pendant laquelle le frère aîné est réveillé par les larmes de sa mère qui, à la question de la grand-mère : « Qu’a-t-elle ? » répond simplement : « Mon fils est mort ! » Et cette grand’mère qui se lève, allume le feu, lave le petit corps, tout cela est de lui ; tout cela est si serré, si simple, si fort ! On n’en peut supprimer un mot, on n’y peut rien changer, rien ajouter. Il n’y a que cinq lignes et ces cinq lignes dessinent au lecteur tout le tableau de cette triste mort, tableau qui se reflète dans l’imagination d’un enfant de six ou sept ans : « À minuit la mère se mit à pleurer. La grand’mère se leva et dit : — Qu’as-tu ? Christ soit avec toi ! La mère dit : — Mon fils est mort ! La grand’mère alluma le feu, lava le corps de l’enfant, lui mit une chemise, le ceintura et le posa sous les icônes. Quand l’aube apparut… » Vous voyez le garçon réveillé par les