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cents roubles à un paysan pour faire valoir leur propriété et ne paient-ils pas deux cents roubles à un étudiant es-sciences camérales ou naturelles ? Pourquoi, au chemin de fer, les paysans contremaîtres dirigent-ils des milliers d’ouvriers et pourquoi les étudiants ne le font-ils pas ? Pourquoi l’étudiant, s’il reçoit une place bien appointée, la reçoit-il non pour le savoir acquis à l’Université mais pour les connaissances acquises ensuite ? Pourquoi les étudiants en droit deviennent-ils officiers et les étudiants ès mathématiques et ès sciences, fonctionnaires ? Pourquoi un laboureur, après avoir vécu toute l’année dans l’aisance, rapporte-t-il à la maison cinquante ou soixante roubles, tandis qu’un étudiant, après une année, laisse cent roubles de dettes ? Pourquoi le peuple paie-t-il au maître d’école huit, neuf, dix roubles par mois, qu’il soit sacristain ou étudiant ? Pourquoi un marchand ne prend-il pas pour employé un étudiant, pourquoi ne lui donne-t-il pas sa fille en mariage, pourquoi ne le reçoit-il pas chez lui alors qu’il fait tout cela pour un fils de paysans ? C’est, me dira-t-on, parce que la société ne sait pas encore apprécier l’instruction, car le patron-étudiant ne trompera pas les ouvriers, ne les ruinera pas en prenant des arrhes ; le marchand-étudiant ne vendra pas à faux poids ; parce que les résultats ne sont pas si sensibles que ceux de la routine et de l’ignorance. C’est très possible, répondrai-je, bien que l’observation me