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avait remarqués au premier relais après Moscou étaient arrivés maintenant au plus haut degré.

La route qu’ils suivaient était jonchée de cadavres de chevaux ; des retardataires de diverses colonnes, déguenillés, se succédaient, tantôt se joignant à l’armée, tantôt se séparant de la colonne en marche.

Quelquefois, pendant la marche, il y avait de fausses alertes et les soldats du convoi, ou prenaient leurs fusils et tiraient, ou s’enfuyaient hâtivement en se bousculant les uns les autres, puis se réunissaient de nouveau et s’injuriaient mutuellement pour leur crainte vaine.

Ces trois cohues qui marchaient ensemble — les munitions de cavalerie, les prisonniers, et les bagages de Junot — formaient cependant quelque chose à part, unique, bien que chacune d’elles fondit rapidement. Les fourgons de munitions, d’abord au nombre de cent vingt, étaient réduits à soixante, les autres avaient été capturés ou abandonnés. Également, des bagages de Junot, quelques fourgons étaient abandonnés et capturés, trois fourgons étaient pillés par les soldats retardataires du corps de Davoust. Aux conversations des Allemands, Pierre comprit que la garde était plutôt pour les bagages que pour les prisonniers et qu’un de leurs camarades, un soldat allemand, avait été fusillé par ordre du maréchal lui-même parce qu’on l’avait trouvé possesseur d’une cuiller d’argent apparte-