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rougeur encore plus vive couvrit son visage, et une émotion encore plus grande, de joie et de peur, saisit son âme. Il s’embrouilla et s’arrêta au milieu de la conversation.

Pierre n’avait pas remarqué Natacha parce qu’il ne s’attendait nullement à la trouver ici, et il ne l’avait pas reconnue, parce que, depuis qu’il l’avait vue, un grand changement s’était fait en elle.

Elle avait maigri, pâli. Mais ce n’était pas ce qui la faisait méconnaissable. Il n’avait pu la reconnaître dès en entrant, parce que, maintenant, sur son visage dont les yeux autrefois brillaient toujours d’un sourire caché de la joie et de la vie, il n’y avait plus l’ombre d’un sourire, il n’y avait que des yeux attentifs, bons et tristement interrogateurs.

La gêne de Pierre ne se reflétait pas en Natacha par la gêne mais par un plaisir qui, légèrement, éclairait tout son visage.