Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol12.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

existait des règles quelconques pour tuer des hommes !)

Malgré les plaintes des Français, malgré que des Russes, de position supérieure, crussent honteux, on ne sait pourquoi, de se battre avec des bâtons et voulussent se tenir suivant les règles en quarte, ou en tierce, faire une feinte habile en prime, etc., le bâton de la guerre populaire se soulevait avec une force menaçante et majestueuse, et, sans tenir compte des goûts et des règles, avec une sotte simplicité mais utilement, sans tâcher de rien comprendre, se soulevait et s’abaissait, frappant les Français, jusqu’à l’anéantissement de l’invasion.

Et le succès n’est pas au peuple qui, comme les Français, en 1813, saluant selon toutes les règles de l’art, tourne l’épée par la garde et, gracieusement la donne au vainqueur magnanime, le succès est au peuple qui, au moment des épreuves, sans demander comment d’autres ont agi en pareil cas, facilement, simplement, soulève le premier bâton qu’il rencontre et frappe jusqu’à ce qu’en son âme le sentiment de l’offense et de la vengeance fasse place au mépris et à la pitié.