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XIX

Qui, parmi les Russes, en lisant la description de la dernière période de la campagne de 1812, n’a pas éprouvé une sorte de dépit, de contrainte, de tristesse ? Qui ne s’est posé cette question : Comment n’a-t-on pas capturé, anéanti tous les Français, quand trois armées avec des forces supérieures les entouraient, quand les Français démontés, mourant de faim et de froid se rendaient en masse, et quand (les historiens nous l’apprennent) le but des Russes consistait précisément à arrêter, cerner et capturer tous les Français ? Comment cette armée russe qui, inférieure en nombre aux Français, avait livré la bataille de Borodino, cette armée qui entourait les Français de trois côtés et dont le but était de les capturer, n’y est-elle pas parvenue ? Les Français avaient-ils tant de supériorité sur nous, que nous, les entourant, ne pouvions les écraser ? Comment cela a-t-il pu se faire ?