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VI

Le lendemain soir, les troupes se préparèrent pour se concentrer au lieu choisi et, pendant la nuit, elles partirent. C’était une nuit d’automne, sans pluie, avec des nuages violet foncé ; la terre était humide mais sans boue et les troupes marchaient sans bruit ; on n’entendait que faiblement le cliquetis de l’artillerie. Il était défendu de causer à haute voix, de fumer, de battre le briquet ; on empêchait le plus possible les chevaux de s’ébrouer. Le mystère de l’entreprise augmentait son attrait.

Les soldats marchaient gaiement ; déjà quelques colonnes s’arrêtaient, mettaient les fusils en faisceaux et se couchaient sur la terre froide, supposant être arrivées où il fallait. Les autres (la majorité ) marchaient toute la nuit, et, naturellement, arrivaient où il ne fallait pas. Seul le comte Orlov Denissov, avec ses Cosaques (le détachement le moins important), arriva à sa place au temps voulu. Seul