Page:Tolstoï - Œuvres complètes, vol11.djvu/367

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


XVI

Le prince André non seulement savait qu’il allait mourir mais il se sentait mourir et déjà était mort à moitié. Il éprouvait la conscience de l’éloignement de toute chose terrestre et de l’allègement joyeux de l’existence. Sans hâte ni trouble il attendait ce qui devait arriver. Cette chose terrible, éternelle, inconnue et lointaine dont il ne cessait de subir la présence durant toute sa vie, était maintenant très proche de lui, presque compréhensible et facilement sensible…

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Auparavant il avait peur de la fin. Deux fois il avait éprouvé ce sentiment terrible de la peur de la mort, de la fin, et maintenant il ne le comprenait déjà plus. Il avait éprouvé ce sentiment pour la première fois quand une grenade tournait devant lui comme une toupie et qu’il regardait le chaume, les buissons, le ciel et savait que c’était la mort qui