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dur que de renoncer au commandement de l’armée.

Et lui non seulement aimait le pouvoir, mais il y était habitué. (Les hommages qu’on avait rendus au prince Prosorovsky, à qui il était attaché en Turquie, excitaient sa jalousie). Il était convaincu que le salut de la Russie lui incombait, que pour cela, contre la volonté de l’empereur et par la volonté du peuple, il était le commandant en chef. Il était persuadé que lui seul, en ce cas difficile, pouvait diriger l’armée, que lui seul au monde pouvait sans effroi se mesurer à son adversaire, à l’invincible Napoléon, et il était horrifié à la pensée de l’ordre qu’il devait donner. Mais il fallait prendre un parti. Il fallait faire cesser les conversations, déjà trop libres, qui se tenaient autour de lui. Il appela les généraux supérieurs.

Ma tête, fût-elle bonne ou mauvaise, n’a qu’à s’aider elle-même, dit-il en se levant du banc, et il partit à Fili où se trouvaient ses équipages.