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en tuant Napoléon). « Eh bien, quoi ? Saisissez-moi ! » se dit encore Pierre avec une expression triste et ferme, en baissant la tête. Pendant que Pierre, au milieu de la chambre, raisonnait de telle façon, la porte du cabinet s’ouvrit et sur le seuil se montra la personne tout à fait changée de Makar Alexéiévitch, auparavant toujours timide.

Son vêtement était déboutonné, son visage rouge et défait. Évidemment il était ivre. En apercevant Pierre, au premier moment il devint confus, mais remarquant la confusion sur le visage de Pierre, il s’enhardit aussitôt et sur ses longues jambes vacillantes, il s’avança au milieu de la chambre.

— Ils ont peur, dit-il d’une voix rauque, assurée. J’ai dit : Je ne me rends pas, je dis… N’est-ce pas, monsieur ?

Il devint pensif et, tout à coup, apercevant le pistolet sur la table, avec une rapidité inattendue, il le saisit et courut dans le couloir.

Guérassime et le portier qui suivaient Makar Alexéiévitch l’arrêtèrent dans le vestibule et se mirent à lui arracher le pistolet.

Pierre, sorti dans le couloir, regardait avec pitié et dégoût ce vieillard à demi fou. Makar Alexéiévitch, crispé par l’effort, retenait le pistolet et criait d’une voix rauque quelque chose qu’il croyait très solennel.

— Aux armes ! À l’abordage ! Ah ! tu ne prendras pas !