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criaient dans le conseil, en se frappant la poitrine ; ils provoquaient en duel ceux qui n’étaient pas de leur avis, en montrant par cela qu’ils étaient prêts à s’offrir en sacrifice au bien général.

D’autres, tout simplement, entre deux conseils et en l’absence des adversaires, demandaient une récompense pour leurs services fidèles, sachant que maintenant on n’aurait pas le temps de la leur refuser. D’autres, comme par hasard, se trouvaient toujours écrasés de travail, devant les yeux de l’empereur. D’autres pour atteindre le but convoité depuis longtemps : dîner chez l’empereur, prouvaient avec acharnement la raison ou le tort d’une nouvelle opinion et, pour cela, apportaient des preuves plus ou moins fortes et justes.

Toutes les gens de ce parti attrapaient des roubles, des croix, des grades ; dans cette chasse ils ne suivaient que la direction de la girouette de la faveur impériale, et, aussitôt qu’ils remarquaient que la girouette tournait d’un côté, tout cet essaim de frelons commençait à bourdonner du même côté, de sorte qu’il était d’autant plus difficile pour l’empereur de tourner la girouette de l’autre côté.

Devant cette incertitude de la situation, devant le danger menaçant et sérieux qui donnait à tout cela un caractère troublé, parmi le tourbillon d’intrigues, d’amours-propres, de conflits, de diverses opinions, conceptions et nationalités de toutes ces personnes, ce huitième parti, le plus nombreux,