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XXXVIII

L’aspect terrifiant du champ de bataille, couvert de cadavres et de blessés, uni à la lourdeur dans la tête, à la nouvelle que vingt généraux qu’il connaissait étaient tués ou blessés, et à la conscience de la faiblesse de sa main jadis puissante, produisaient une impression inattendue sur Napoléon, qui, d’ordinaire, aimait à regarder les morts et les blessés pour éprouver par là, disait-il, sa force d’âme.

Mais ce jour, l’aspect effrayant du champ de bataille avait vaincu cette force d’âme dans laquelle il mettait son mérite et sa grandeur ; il se retira à la hâte du champ de bataille et revint au mamelon de Schévardine.

Pâle, bouffi, lourd, les yeux vagues, le nez rouge, la voix enrouée, il était assis sur un pliant et entendait sans le vouloir et sans lever les yeux les sons de la canonnade. Avec un ennui maladif