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le prince, de qui, disait-il, il ne pouvait se passer dans les moments importants.

Quand on apporta à Koutouzov la nouvelle que Murat était pris et quand les officiers de l’état-major le félicitèrent, il sourit.

— Attendez, messieurs, attendez, la bataille est gagnée et la capture de Murat n’a rien d’extraordinaire, mais il vaut mieux attendre pour se réjouir.

Cependant il envoya un aide de camp porter aux troupes cette nouvelle.

Quand, du flanc gauche, accourut Tcherbinine apportant la nouvelle que les Français avaient pris les flèches et Séméonovskoié, Koutouzov devinant aux bruits apportés du champ de bataille et au visage de Tcherbinine, que la situation n’était pas bonne, se leva comme s’il dépliait ses jambes et, prenant Tcherbinine sous le bras, il l’emmena à l’écart.

— Va, mon cher, et vois si l’on ne peut pas faire quelque chose, dit-il à Ermolov.

Koutouzov était à Gorki, au centre de la position de l’armée russe. L’attaque de Napoléon, dirigée sur notre flanc gauche, était plusieurs fois repoussée. Au centre, les Français n’avaient pas dépassé Borodino ; au flanc gauche, la cavalerie d’Ouvarov avait mis les Français en fuite.

À trois heures, les attaques des Français cessèrent. Sur tous les visages qui venaient du champ de bataille et de ceux qui l’entouraient, Koutouzov lisait la tension arrivée au plus haut degré.