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Les maréchaux et les généraux qui se trouvaient plus près du champ de bataille, mais qui, comme Napoléon, ne participaient pas au combat même et n’entraient que de temps en temps sous le feu des balles, prenaient leurs dispositions et donnaient des ordres, où et de quel endroit tirer, où devaient aller la cavalerie et l’infanterie, sans rien demander à Napoléon.

Mais leurs ordres, comme ceux de Napoléon, étaient exécutés en de minimes proportions : la plupart étaient tout à fait contraires à ce qui était fait.

Les soldats à qui l’on ordonnait d’aller en avant, tombant sous la mitraille, couraient en arrière. Ceux à qui on ordonnait de rester en place, tout à coup, voyaient surgir devant eux les Russes et parfois se jetaient en avant, et la cavalerie courait sans en avoir reçu l’ordre et poursuivait les Russes. Ainsi, deux régiments de cavalerie franchirent les ravins de Séménovskoié puis commencèrent à gravir la colline, et se retournant, au galop, revinrent en arrière.

Les soldats d’infanterie agissaient de même, parce qu’ils couraient où on ne le leur avait point ordonné. Tous les ordres pour mouvoir les canons, pour déplacer les troupes d’infanterie, pour tirer, pour envoyer contre les fantassins russes une charge de cavalerie, tous ces ordres étaient donnés par les chefs qui se trouvaient le plus près des