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pour ainsi dire, le maître de chaque homme ; que dis-je ! son maître, son précepteur, son pédagogue (Très-bien !) ; que, de peur de le laisser faillir, il doit se placer sans cesse à côté de lui, au-dessus de lui, autour de lui, pour le guider, le garantir, le maintenir, le retenir ; en un mot, c’est la confiscation, comme je le disais tout à l’heure, dans un degré plus ou moins grand, de la liberté humaine (Nouvelles marques d’assentiment) ; à ce point que, si, en définitive, j’avais à trouver une formule générale pour exprimer ce que m’apparaît le socialisme dans son ensemble, je dirais que c’est une nouvelle formule de la servitude. (Très-vive approbation.)

Vous voyez, messieurs, que je ne suis pas entré dans le détail des systèmes ; j’ai peint le socialisme par ses traits principaux, ils suffisent pour le faire reconnaître ; partout où vous les verrez, soyez sûrs que le socialisme est là, et partout où vous verrez le socialisme, soyez sûrs que ces traits se retrouvent.

Et bien ! messieurs, qu’est-ce que tout cela ? Est-ce, comme on l’a prétendu tant de fois, la continuation, le complément légitime, le perfectionnement de la révolution française ? est-ce, comme on l’a dit tant de fois, le complément ; le développement naturel de la démocratie ? Non, messieurs, ce n’est ni l’un ni l’autre ; rappelez-vous, messieurs, la révolution française ; remontez à cette origine terrible et glorieuse de notre histoire moderne. Est-ce donc en parlant, comme le prétendait hier un orateur, aux sentiments matériels, aux besoins matériels de l’homme, que la révolution française a fait les grandes choses qui l’ont illustrée dans le monde ? Croyez-vous donc que c’est en parlant de salaire, de bien-être, de consommation illimitée, de satisfaction sans bornes des besoins physiques.

Le citoyen Mathieu (de la Drôme). Je n’ai rien dit de semblable.

Le citoyen de Tocqueville. Croyez-vous que ce soit en