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rige, n’obtient presque jamais à propos ou d’une manière suffisante les fonds nécessaires à ses besoins.

La Commission est instruite que le gouvernement s’occupe en ce moment d’instituer le pouvoir municipal en Afrique ; elle l’en félicite. L’œuvre est pressante ; on peut prévoir qu’elle sera difficile. L’état de choses actuel, tout vicieux qu’il est, a déjà créé des habitudes et des préjugés difficiles à vaincre. Sa destruction ne peut manquer d’ailleurs de diminuer les attributions de plusieurs des pouvoirs existants, de leur ôler le maniement d’une partie des deniers publics, et de les faire déchoir à leurs propres yeux. On cherchera donc, soit directement, soit indirectement, à s’y opposer. Nous espérons que le gouvernement aura l’énergie nécessaire pour surmonter de telles résistances.

L’ordonnance du 15 avril 1845, dans son article 104, a voulu que plusieurs Européens fissent partie des Commissions consultatives d’arrondissement, concurremment avec les chefs de service ; c’était introduire dans l’administration du pays le principe de l’intervention indirecte des citoyens. Il est à désirer, messieurs, que ce germe se développe, et que les intérêts et les idées de la population européenne trouvent près des autorités locales, non-seulement un accès facile, mais des organes habituels et officiels. Sans donner à la presse une liberté illimitée, il serait sage de la renfermer dans des limites moins étroites que celles entre lesquelles elle se meut aujourd’hui. A la censure qui la supprime, il conviendrait de substituer une ordonnance qui la réglementât. Qu’on lui interdise de traiter certains sujets dangereux pour notre domination en Afrique, cela est possible et même nécessaire. Notre législation française, elle-même, contient des restrictions analogues ; mais qu’on lui livre la libre discussion du reste.

Quelques membres ont dit qu’il était impossible de trouver pour la presse un état intermédiaire entre l’indépendance entière et l’asservissement complet ; que toute mesure préventive détruirait radicalement la liberté, et ne laisserait à l’écrivain aucune garantie ; qu’ainsi, entre une législation purement répressive et la censure, on ne trouverait jamais rien. La majorité de votre Commission n’a pas été de cet avis. Elle ne croit pas le problème aussi insoluble qu’on vient de le dire, elle pense que sa solution doit être cherchée, et qu’il importe beaucoup de la trouver. Cela importe à la fois au