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Il pouvait sans doute arriver que les faits antérieurs à la condamnation fussent de nature à retarder ou à hâter la mise en apprentissage ; mais ces faits n’étaient point complètement inconnus de l’autorité administrative. D’ailleurs, il était possible de tout concilier en établissant que l’élargissement provisoire ne pourrait être accordé par l’administration qu’après avoir consulté l’autorité judiciaire. C’est à ce système que la Commission s’est arrêtée. Elle vous propose de déclarer que la mise en apprentissage et la réintégration auront lieu en vertu des ordres de l’administration, et sur l’avis de l’autorité judiciaire.

Le système de mise en apprentissage des détenus, pour être fécond, a besoin d’être mis en action par les sociétés de patronage.

Ces sociétés ont déjà produit de grands biens et promettent d’en produire de plus grands encore. La Commission pense que toutes les mesures que l’administration pourrait prendre dans le but de favoriser le développement de sociétés semblables seront d’un secours efficace à la réforme des criminels et serviront puissamment à la diminution des crimes.

Quant au régime à suivre dans les maisons spéciales créées par l’article 18, le projet du gouvernement n’en dit rien, et la Commission a cru devoir imiter ce silence. Voici quelles ont été ses raisons.

Les jeunes détenus qui sont renfermés dans les prisons forment une classe à part très-différente de toutes les autres. Les uns, et c’est le plus petit nombre, sont condamnés pour des crimes et des délits que leur âge rend excusables aux yeux de la raison aussi bien qu’aux yeux de la loi. Le but de l’emprisonnement auquel on les condamne, est bien moins de les punir que de les corriger, et de changer, pendant qu’il en est temps encore, les instincts d’un mauvais naturel ou les penchants qu’une mauvaise éducation a fait naître.

Les autres, et c’est le plus grand nombre, ont été déclarés non coupables par les tribunaux qui, n’osant pas les rendre à leur famille, les ont confiés, pendant un certain nombre d’années, aux soins de l’administration.

Le but principal de l'emprisonnement, pour ces deux catégories, est donc de réformer. C’est, ainsi qu’on l’a dit plus haut, une affaire