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Ces mesures, qui satisferaient l’humanité, seraient favorables aux colons eux-mêmes ; il est à croire qu’ils gagneraient en travail, en sécurité et en avenir, beaucoup plus qu’ils ne perdraient en argent.

La commission n’est point appelée à discuter les détails de ce plan ni à en proposer l’adoption à la chambre ; mais son devoir est de dire qu’elle en a unanimement approuvé les idées mères.

Dans le système anglais, c’était la loi qui avait fait de l’esclave l’apprenti de son ancien maî(re. Le maître perdait une partie de sa puissance, il conservait l’autre. Son pouvoir n’était pas emprunté, il continuait à l’exercer directement en vertu de son même droit ; le gouvernement n’intervenait que pour régler l’usage et empêcher l’abus de ce droit.

Une partie des embarras qu’a rencontrés l’apprentissage est sortie de cette source.

La commission a pensé qu’il serait infiniment plus conforme à l’intérêt des nègres, aussi bien qu’à celui des colons, de détruire d’un seul coup tous les anciens rapports qui existaient entre le maître et son esclave, et de transporter à l’État la tutelle de toute la population afiranchie. Cette manière d’agir a plusieurs avantages considérables.

Des gênes inévitables accompagnent le passage de l’esclavage à la liberté. Il faut éviter, autant que possible, qu’elles soient ou qu’elles paraissent imposées au nouvel affranchi par son ancien maître. En pareille matière, il est sage de laisser au gouvernement toute la responsabilité, avec le pouvoir.

L’État devenant ainsi le tuteur des anciens esclaves, il se trouve en pleine liberté de prendre tous les moyens qui peuvent le mieux et le plus vite préparer ceux-ci à l’entier usage de l’indépendance. Il peut leur imposer les conditions qu’il juge indispensables, et leur faire subir les épreuves nécessaires avant d’achever de les livrer à eux-mêmes. Il est libre de prendre, suivant les cas, toutes les me-

    locaux d’Antigue. « Le gouvernement local d’Antigue, dit M. le capitaine Halley, dans son rapport du 15 décembre 1858, a adopté des mesures sages dictées par une humanité fort louable, relativement aux vieillards et à tous les gens infirmes qui sont dans l’impossibité de pourvoir à leur subsistance. Il a arrêté que tous les individus placés dans ces catégories resteraient à la charge des anciens propriétaires. »