Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 9.djvu/178

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

On considérait alors l’œuvre comme à peu près terminée. M. Meunier, auteur des Notes historiques écrivait : « Il ne s’agit plus maintenant que de mettre la dernière main à cette grande entreprise. » Dans le rapport fait à l’Assemblée constituante, en 1701, la même idée se reproduit. Ce résultat, dont on semblait vouloir se contenter, était cependant bien insuffisant. On avait un abri, mais on ne possédait point encore une rade qui fut véritablement défendue soit contre la mer, soit contre les attaques de l’ennemi. La digue sous— marine qui la formait, diminuait la violence des vagues, mais n’arrêtait pas leur choc, puisqu’aux grandes marées elle se trouvait couverte de plus de vingt-deux pieds d’eau. Les tempêtes s’y faisaient sentir moins longtemps qu’au dehors. On n’avait à en souffrir que deux heures avant et deux heures après la marée haute. Mais quoique les navires y fussent rarement en péril, ils y étaient habituellement très-fatigués par la houle et le ressac. D’une autre part, on y était à la merci d’une attaque. La digue n’étant surmontée d’aucun fort, rien ne pouvait empêcher une flotte ennemie, soit de pénétrer en dedans de cet ouvrage, ou même se tenant en dehors, d’écraser les vaisseaux français au mouillage. On avait donc préparé à nos marins un champ de bataille plutôt qu’un lieu de repos.

Aussi ne tarda-t-on pas à désirer plus. En 1792, l’Assemblée législative voulut qu’une commission spéciale, composée d’ingénieurs, d’officiers du génie et de marins, vint à Cherbourg examiner ce qui avait été fait et ce qui restait à faire. Le rapport de la Commission de 1792 fait époque dans

    tent qu’indirectement ou même qui ne s’y rapportent point du tout. C’est ainsi que la digue porte la responsabilité de deux cent mille francs employés a faire de l’ancienne abbaye lui hôtel pour l’habitation du duc de Beuvron. Le relevé dont il est question fait voir qu’à la reprise de travaux en 1802, on avait déjà dépensé à Cherbourg ; trente et un million.cent quatre-vingt-huit mille six cent soixante-dix-neuf francs. C’est de ce chiffre, dont on ignorait le détail et l’origine, qu’on est toujours parti depuis.