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posséder un grand port en face du port de Marseille, et d’occuper deux cents lieues de côte dans la Méditerranée, en face des côtes de la France. Ne discutons point ce qui ne saurait être mis en question.

Mais comment rendre plus féconde entre nos mains et moins onéreuse pour nos finances la possession de cet empire, toujours si glorieuse pour nos armes ? Comment attirer sur le sol africain et surtout comment y retenir cette population européenne dont la présence y créerait seule une force capable de remplacer peu à peu l’armée, et, à la place des races barbares qui couvrent le sol de l’Algérie, établirait un nouveau peuple, une nouvelle France, une nouvelle civilisation ? Quels sont les procédés suivant lesquels la colonisation peut s’accomplir, promptement, sûrement, aux moindres frais possibles pour la mère-patrie ? Que doit faire, dans cette œuvre, l’administration ? que doit-elle laisser faire ? que doit-elle ne pas faire ? et comment porter ou attirer en Algérie des populations nouvelles sans entrer en contact et en conflit avec la vieille société arabe et kabyle qui y est fondée depuis des siècles ? Comment établir les Européens en Algérie sans les placer près des indigènes ? Comment imposer ce voisinage aux indigènes sans les détruire ? Quelles lois donner aux uns et autres ? Comment les régir par les mêmes lois ? Quelles lois différentes leur appliquer ? voilà sans doute de graves questions, et dont l’intérêt n’a jamais été plus vif et plus présent.

Eh bien ! ici encore, nous le demandons sincèrement, ne croit-on pas qu’il y eût quelque utilité à relire ce que