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de douze ans, et les avoir fait travailler plus que le temps voulu.

Le parlement a fait, il y a quelques années, une loi qui défend d’employer dans les manufactures les enfants au-dessous d’un certain âge et plus d’un certain temps. La même loi, je pense, a institué, sur tous les points les plus manufacturiers du royaume, des fonctionnaires chargés de veiller à son exécution. Ce sont ces officiers qui poursuivent les contraventions à la loi devant les tribunaux ordinaires. Ceci offre un bon exemple des habitudes administratives anglaises. En général, le premier venu poursuit. Mais voici une matière dans laquelle il n’est pas probable que personne poursuivît ; car qui est lésé par le délit ? l’enfant et les parents de l’enfant. Mais l’enfant lui-même n’a qu’une idée imparfaite de son droit et de l’utilité du droit, et ses parents sont complices du délit. Dans ce cas, le parlement est obligé d’employer un poursuivant d’office. Mais comme le pouvoir central n’a, dans les localités, aucun fonctionnaire fixe, il est forcé de nommer ad hoc dans certains lieux, des agents qui ne sont chargés que de cette spécialité. Partout où ces agents n’existent point, la loi est mort-née.

Liverpool, 7 juillet 1835,

COMMENT ON PEUT ATTRIBUER AUX PRINCIPES POLITIQUES DES ANGLAIS

UNE PARTIE DE LEUR PROSPÉRITÉ COMMERCIALE

ET MANUFACTURIÈRE

Originairement le pouvoir politique, en Angleterre, comme dans le reste de l’Europe, était exclusivement dans les mains de la noblesse proprement dite. La noblesse anglaise, ayant eu de bonne heure l’idée et le besoin de s’appuyer sur les classes moyennes, et, n’ayant