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qui leur ressemble, je n’aperçois plus de digue à aucune sorte de tyrannie, et un grand peuple peut être opprimé impunément par une poignée de factieux ou par un homme.

La réunion d’une grande convention politique (car il y en a de tous genres), qui peut souvent devenir une mesure nécessaire, est toujours, même en Amérique, un événement grave et que les amis de leur pays n’envisagent qu’avec crainte.

Ceci se vit bien clairement dans la convention de 1831, où tous les efforts des hommes distingués qui faisaient partie de l’assemblée tendirent à en modérer le langage et à en restreindre l’objet. Il est probable que la convention de 1831 exerça en effet une grande influence sur l’esprit des mécontents et les prépara à la révolte ouverte qui eut lieu en 1832 contre les lois commerciales de l’Union.

On peut se dissimuler que la liberté illimitée d’association, en matière politique, ne soit, de toutes les libertés, la dernière qu’un peuple puisse supporter. Si elle ne le fait pas tomber dans l’anarchie, elle la lui fait pour ainsi dire toucher à chaque instant. Cette liberté, si dangereuse, offre cependant sur un point des garanties ; dans les pays où les associations sont libres, les sociétés secrètes sont inconnues. En Amérique, il y a des factieux, mais point de conspirateurs.

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