Nord pour passer au Sud, mais ils se trouvent vis-à-vis des Européens dans une position analogue à celle des indigènes ; ils restent à moitié civilisés et privés de droits au milieu d’une population qui leur est infiniment supérieure en richesses et en lumières ; ils sont en butte à la tyrannie des lois[1] et à l’intolérance des mœurs. Plus malheureux sous un certain rapport que les Indiens, ils ont contre eux les souvenirs de l’esclavage, et ils ne peuvent réclamer la possession d’un seul endroit du sol ; beaucoup succombent à leur misère[2] ; les autres se concentrent dans les villes, où, se chargeant des plus grossiers travaux, ils mènent une existence précaire et misérable.
Quand, d’ailleurs, le nombre des nègres continuerait à croître de la même manière qu’à l’époque où ils ne possédaient pas encore la liberté, le nombre des blancs augmentant avec une double vitesse après l’abolition de l’esclavage, les noirs seraient bientôt comme engloutis au milieu des flots d’une population étrangère.
Un pays cultivé par des esclaves est en général moins
- ↑ Les États où l’esclavage est aboli s’appliquent ordinairement à rendre fâcheux aux nègres libres le séjour de leur territoire ; et comme il s’établit sur ce point une sorte d’émulation entre les différents États, les malheureux nègres ne peuvent que choisir entre des maux.
- ↑ Il existe une grande différence entre la mortalité des blancs et celle des noirs dans les États où l’esclavage est aboli : de 1820 à 1831, il n’est mort à Philadelphie qu’un blanc sur quarante-deux individus appartenant à la race blanche, tandis qu’il y est mort un nègre sur vingt et un individus appartenant à la race noire. La mortalité n’est pas si grande à beaucoup près parmi les nègres esclaves. (Voyez Emerson’s medical Statistics, p. 28.)