mine dans les deux. L’article contient en germe tout ce qui sera développé dans le livre. On trouve dans le premier des idées plus dogmatiques, des propositions plus absolues ; dans le second, une étude plus mûrie des faits, des affirmations appuyées sur plus de preuves, les mêmes appréciations avec les tempéraments et les nuances dues à l’étude et à l’expérience. Du reste, dans le morceau écrit en 1836, la pensée de Tocqueville se montre peut-être plus vive et plus saisissante, parce qu’alors moins asservie aux faits et moins contenue par une longue méditation, elle s’abandonnait plus librement à son élan. Il est curieux d’observer, dans l’article de 1836, avec quelle puissance d’intuition la sagacité de Tocqueville avait dès lors pénétré les vérités que, vingt ans après, une étude approfondie rendait manifestes à ses yeux. Aujourd’hui nous pouvons offrir ce morceau au public français, grâce à deux circonstances heureuses. La première, c’est que nous y avons été autorisés par M. John Stuart Mill, l’illustre ami de Tocqueville, dont cet article était la propriété, et qui se l’était encore approprié par son admirable traduction. Nous avons eu un autre bonheur, celui de retrouver, parmi les papiers de Tocqueville, le manuscrit original de cet article. Nous avons pensé que le public mettrait du prix à connaître un écrit qu’on peut considérer à juste titre comme la préface d’un livre dont malheureusement nous ne posséderons jamais que des fragments. Le tome huitième commencera par ce mor-
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