Page:Tocqueville - Œuvres complètes, édition 1866, volume 1.djvu/330

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

car la législation ne sait point s’accommoder aux besoins et aux mœurs des hommes ; ce qui est une grande cause de troubles et de misères.

Cet inconvénient n’existe pas dans les confédérations : le congrès règle les principaux actes de l’existence sociale ; tout le détail en est abandonné aux législations provinciales.

On ne saurait se figurer à quel point cette division de la souveraineté sert au bien-être de chacun des États dont l’Union se compose. Dans ces petites sociétés que ne préoccupe point le soin de se défendre ou de s’agrandir, toute la puissance publique et toute l’énergie individuelle sont tournées du côté des améliorations intérieures. Le gouvernement central de chaque État étant placé tout à côté des gouvernés, est journellement averti des besoins qui se font sentir : aussi voit-on présenter chaque année de nouveaux plans qui, discutés dans les assemblées communales ou devant la législature de l’État, et reproduits ensuite par la presse, excitent l’intérêt universel et le zèle des citoyens. Ce besoin d’améliorer agite sans cesse les républiques américaines et ne les trouble pas ; l’ambition du pouvoir y laisse la place à l’amour du bien-être, passion plus vulgaire, mais moins dangereuse. C’est une opinion généralement répandue en Amérique, que l’existence et la durée des formes républicaines dans le Nouveau-Monde dépendent de l’existence et de la durée du système fédératif. On attribue une grande partie des misères dans lesquelles sont plongés les nouveaux États de l’Amérique du Sud à ce