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C’est en Angleterre qu’il faut chercher l’explication de ce phénomène : les lois dont je parle sont anglaises[1]. Les Américains ne les ont point changées, quoiqu’elles répugnent à l’ensemble de leur législation et à la masse de leur idées.

La chose qu’un peuple change le moins après ses usages, c’est sa législation civile. Les lois civiles ne sont familières qu’aux légistes, c’est-à-dire à ceux qui ont un intérêt direct à les maintenir telles qu’elles sont, bonnes ou mauvaises, par la raison qu’ils les savent. Le gros de la nation les connaît à peine ; il ne les voit agir que dans des cas particuliers, n’en saisit que difficilement la tendance, et s’y soumet sans y songer.

J’ai cité un exemple, j’aurais pu en signaler beaucoup d’autres.

Le tableau que présente la Société américaine est, si je puis m’exprimer ainsi, couvert d’une couche démocratique, sous laquelle on voit de temps en temps percer les anciennes couleurs de l’aristocratie.

  1. Voyez Blakstone et Delolme, liv. I, chap. x.