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sont punis de mort ; l’outrage fait par un fils à ses parents est frappé de la même peine. On transportait ainsi la législation d’un peuple rude et à demi civilisé au sein d’une société dont l’esprit était éclairé et les mœurs douces : aussi ne vit-on jamais la peine de mort plus prodiguée dans les lois, ni appliquée à moins de coupables.

Les législateurs, dans ce corps de lois pénales, sont surtout préoccupés du soin de maintenir l’ordre moral et les bonnes mœurs dans la société ; ils pénètrent ainsi sans cesse dans le domaine de la conscience, et il n’est presque pas de péchés qu’ils ne parviennent à soumettre à la censure du magistrat. Le lecteur a pu remarquer avec quelle sévérité ces lois frappaient l’adultère et le viol. Le simple commerce entre gens non mariés y est sévèrement réprimé. On laisse au juge le droit d’infliger aux coupables l’une de ces trois peines : l’amende, le fouet ou le mariage[1] ; et s’il en faut croire les registres

    effet la mort pour ce crime ; il cite à ce propos une anecdote curieuse, qui se rapporte à l’année 1663. Une femme mariée avait eu des relations d’amour avec un jeune homme ; elle devint veuve, elle l’épousa ; plusieurs années se passèrent : le public étant enfin venu à soupçonner l’intimité qui avait jadis régné entre les époux, ils furent poursuivis criminellement ; on les mit en prison, et peu s’en fallut qu’on ne les condamnât l’un et l’autre à mort.

  1. Code of 1650, p. 48.

    Il arrivait, à ce qu’il paraît, quelquefois aux juges de prononcer cumulativement ces diverses peines, comme on le voit dans un arrêt rendu en 1643 (p. 114, New-Haven antiquities), qui porte que Marguerite Bedfort, convaincue de s’être livrée à des actes répréhensibles, subira la peine du fouet, et qu’il lui sera enjoint de se marier avec Nicolas Jemmings, son complice.