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puisse arbitrairement faire le droit. Le droit, comme fin ou droit absolu, n’est pas à faire ; il est en dehors de la volonté de l’homme ; il tient essentiellement à la nature humaine, aux lois qui la régissent, aux conditions nécessaires de son développement. Mais il y a un droit comme moyen ou droit relatif plus ou moins heureux de réaliser le droit absolu. C’est celui-là qui est à trouver, qui est variable comme les circonstances, et qui dépend jusqu’à un certain point de la volonté générale. C’est un droit réglementaire, de procédure ou de forme, qui doit sans doute être toujours approprié au droit fondamental, à sa réalisation, mais qui peut l’être à des degrés indéfiniment divers. De là la diversité contingente et l’unité nécessaire du droit public, suivant qu’on l’envisage dans ses moyens ou dans sa fin, et qu’on tient compte, comme on le doit, des circonstances internes ou externes de civilisation et de position où se trouvent les sociétés humaines.

Il faut reconnaître, au surplus, que la volonté générale, alors même qu’elle serait unanime, peut se tromper non seulement sur le droit relatif ou de moyen et de forme, mais aussi sur le droit absolu ou de fin et de fond. Aussi n’est-elle point enchaînée par ses propres décisions ; elle peut défaire partiellement ou complètement ce qu’elle avait fait, corriger dans son œuvre ce qui lui semble défectueux, l’améliorer en la faisant passer du bien au mieux. Mais elle n’aura jamais le droit, sous prétexte de bien public, de sacrifier le droit absolu des individus ou de la société. L’unanimité seule, par le fait qu’elle