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qui n’entendent goutte au métier, elle présente les caractères de l’improvisation. Mais, la brièveté, la précision des moindres pièces me l’indiquaient : miss Robinson n’a dû regarder ni à sa peine, ni à son temps. Ses aveux ne m’ont guère surpris.

« Hélas ! je voudrais tant posséder le don de spontanéité !… mais puisque cela n’est pas, mieux vaut confesser la vérité. Ce n’est qu’à force de retouches, de refontes, de reprises, que j’arrive à la simplicité. Tel pauvre petit quatrain du Jardin Italien, avant de traduire mon intention, n’a pas réclamé moins de quatorze à quinze versions différentes !… C’est une maladie ; il m’est arrivé d’être si préoccupée d’un détail de syntaxe, de la musique d’une phrase, que ma pensée poursuivait ce travail de style, jusque dans l’inconscience du sommeil. Alors, plus d’une fois, me suis-je réveillée en plein cauchemar, criant tout haut la période que je n’étais point parvenue à terminer durant le labeur conscient des veilles !… »