Page:Tissandier - La navigation aerienne 1886.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’origine de cette étonnante découverte. Voici comment M. de Gérando en a fait connaître le premier motif dans sa notice biographique sur Joseph de Montgolfier, et d’après ce que lui avait dit l’inventeur lui-même.

Joseph Montgolfier se trouvait à Avignon et c’était à l’époque où les armées combinées tentaient le siège de Gibraltar. Seul, au coin de sa cheminée, rêvant selon sa coutume, il considérait une sorte d’estampe qui représentait les travaux du siège ; il s’impatientait de voir qu’on ne pût atteindre au corps de la place, ni par terre, ni par eau. « Mais ne pourrait-on point y arriver au travers des airs ? la fumée s’élève dans la cheminée ; pourquoi n’emmagasinerait-on pas cette fumée de manière à en composer une force disponible ? » Son esprit calcule à l’instant le poids d’une surface donnée de papier ou de taffetas ; construit sans désemparer son petit ballon, et le voit s’élever du plancher, à la grande surprise de son hôtesse et avec une joie singulière. Il écrit sur-le-champ à son frère Étienne, qui était pour lors à Annonay[1] : « Prépare promptement des provisions de taffetas, de cordages, et tu verrais une des choses les plus étonnantes du monde. »

C’est le 5 juin 1783 que Joseph et Étienne Montgolfier lancèrent pour la première fois à l’air libre la sphère aérostatique. C’était un ballon de papier gonflé d’air chaud. Il monta dans l’espace, en présence des membres des États du Vivarais et de nombreux habitants du pays. — Cette expérience eut un retentissement considérable ; on comprenait

  1. La lettre existe encore et a été produite à l’Institut à l’occasion de la nomination de Joseph de Montgolfier.