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fierons le soins de plaider ici la cause des aérostats dirigeables

Si on veut diriger un ballon, il faut une force ; il faut le munir d’un moteur capable de l’entraîner, d’un propulseur qui puisse au besoin lui faire remonter les courants d’air. Quand on veut faire marcher une voiture, on y attelle un cheval, un wagon exige une locomotive, un bateau des rameurs travaillant : l’oiseau n’a pas seulement des ailes, il produit la force musculaire qui les anime ; de même, le ballon doit être remorqué par une machine faisant du travail. Que cette machine soit un moteur animé, électrique, à vapeur, à gaz, peu nous importe en théorie, mais, quelle qu’elle soit, il en faut une. Telle est l’indiscutable nécessité que nous devons subir pour diriger un ballon.

Ce n’est pas tout d’avoir un moteur, nous devons encore chercher comment nous l’emploierons. C’est ici que se place la terrible question du point d’appui, de l’action et de la réaction. Prenons des exemples ; on tire un coup de canon : la poudre enflammée produit un gaz qui se détend, c’est la force ; il chasse le boulet, c’est l’action ; mais la pièce recule, c’est la réaction. Seulement la pièce prend moins de vitesse que le boulet, parce qu’elle est plus lourde. Un animal détend ses muscles pour sauter ; soyez sûr que la Terre recule, mais elle est si incomparablement grosse que son recul est insensible. On exprime autrement ce phénomène en disant que le boulet prend son point d’appui sur la pièce, et l’animal qui saute, sur la terre. L’eau fait le même office dans un bateau à roues, les palettes chassent l’eau en arrière, mais le navire avance, et s’il est à hélice, vous voyez un courant d’eau vivement lancé qui recule. Enfin, l’air obéit à la même loi et fait la même fonction : il sert d’appui et pour conclure si nous fixons à la nacelle une hélice dont l’axe soit horizontal et que nous la fassions mouvoir, elle avancera